A la base série de romans jeunesse écrite par Nisio Isin, Bakemonogatari raconte les aventures surnaturelles du lycéen Koyomi Araragi à travers des petites histoires se centrant chacune sur un personnage en particulier. Lesdits personnages, tout comme Koyomi dans des événements antérieurs au début du récit, ont affaire à des esprits, des dieux ou des créatures étranges, tous devenant tout aussi problématique pour les hantés que pour notre héros (celui-ci étant ainsi un ex-vampire dont il ne reste plus que le pouvoir de régénération rapide). Sa première rencontre paranormale se fait avec Hitagi Senjôgahara, une fille dont le poids n'excède pas les cinq kilos...

Parlons d'Hitagi, justement. Avec Koyomi, ils vont former le duo principal de Bakemonogatari. Duo comique avant tout, car la série navigue beaucoup dans le registre de l'humour ; entre les deux personnages, c'est un ping-pong constant de répliques qui se joue à chaque épisode. Koyomi est de nature détendue, indolente et magnanime, tout le contraire d'Hitagi qui est aggressive, paranoïaque et rancunière. On dit bien que les contraires s'attirent (tout comme l'on dit "qui se ressemble s'assemble", comme quoi les proverbes et dictons, c'est du flan) et dans notre cas, ce couple improbable fait des étincelles et apporte beaucoup au charme de la série, surtout Hitagi et ses répliques acérées qui savent transpercer toute résistance. J'aime beaucoup lorsque des duos comiques à la dynamique impeccable se forment et je suis bien servi avec les savoureux dialogues de Koyomi et Hitagi.

Parlons-en, de ces dialogues. Dans Bakemonogatari, la parole est dévorante, elle se nourrit de l'histoire, des personnages, de l'action, et ne semble jamais rassasiée. Elle est tellement énorme, elle occupe tellement d'espace qu'elle ne semble laisser place pour rien d'autre. Elle est également très riche, aussi bien en jeux de mots made in Japan qu'en sujets traités. Il y a fort à parier que les romans de Nisio Isin soient eux-mêmes très généreux en dialogues ; si ce type de procédé narratif a le don de m'agacer en littérature - allez savoir pourquoi, c'est comme un rejet naturel - je dois avouer tout au contraire que son adaptation télévisée m'enchante au plus haut point. De cette hégémonie de la parole découle une double narration plus développée que d'habitude : narration par les dialogues et narration par l'image, les deux s'appuyant alternativement l'une sur l'autre. C'est un étrange équilibre qui se joue sous nos yeux et s'écoute dans nos oreilles, étrange parce que peu commun, sauf pour un studio d'animation comme Shaft, habitué à bidouiller tous les éléments constituant un dessin-animé, et surtout les images.

Parlons des images, d'ailleurs. Le résultat est destabilisant pour quiconque s'attend à quelque chose de classique (du moins, pas quelque chose de classiquement shaftien), mais on peut néanmoins s'habituer au rythme et découpage particulier de la série. On constate en effet assez rapidement que la plupart des scènes suivent un flux commun, bercées par les dialogues et employant les images pour les illustrer, les enrichir de significations ou pour divaguer. Entre les architectures complexes des décors - constitués de multiples lignes se croisant et s'enchevêtrant -, les codes de couleurs, les ajouts de photographies dans les dessins et les angles de vue qui s'enchaînent sans laisser le temps de respirer, Bakemonogatari s'inscrit dans la continuité du travail effectué précédemment par Shaft, comme dans Hidamari Sketch ou Maria†Holic. Cependant, malgré ce déferlement visuel, la série a un rythme posé, du moins dans son scénario : l'histoire progresse lentement mais sûrement.

Et parlons de cette histoire, tiens. L'un des attraits de la série, hormis les caractères bien trempés de ses protagonistes, réside dans l'atmosphère mystérieuse qu'elle dégage. Chaque nouveau personnage devient un cas à résoudre, une énigme qui garde la tension et qui disperse ses indices malicieusement tout le long du récit. Sans faire trop de bruit à ce sujet au préalable, l'histoire de Bakemonogatari sait néanmoins nous rappeler aux moments cruciaux son côté paranormal et nous apporter intelligemment la solution du courant mystère, délivrant ainsi du suspens que l'on avait presque oublié derrière l'aspect comique des situations. Le mélange est subtil et les transitions sont bien amenées, ce qui m'a laissé une agréable impression de rafraîchissement une fois un arc scénaristique terminé. Pour finir, ce serait être ingrat que d'oublier de parler des musiques et des génériques de la série, notamment le très bon Kimi no Shiranai Monogatari de fin : et comme je ne pèse pas bien lourd, je n'oublie pas.

Parlons bien mais parlons peu, au final : Bakemonogatari, c'est pour le moment (six épisodes au compteur) très bon.