Dans une Rome plus belle qu'elle ne le sera jamais, la jeune Nicoletta part à la rencontre de sa mère qui l'a abandonnée, alors qu'elle n'était encore qu'une enfant, pour aller se marier avec un bel italien redoutant les mères divorcées. Nicoletta découvre alors ainsi le restaurant Casetta dell'Orso, dont sa mère en est la propriétaire avec son mari et dont la particularité vient de son personnel, des cuisiniers aux serveurs, composé d'hommes plus ou moins âgés, aux manières raffinées et portant tous des lunettes, fétiche de la mère de Nicoletta. Magnifique vitrine pour toutes les dames de la ville en manque de classe masculine... ainsi que pour Nicoletta, qui va tomber sous le charme de Claudio, le maître d'hotel.

Le récit va ainsi se centrer, à chaque épisode, sur l'un des membres du Casetta dell'Orso, tout en continuant en arrière-plan à faire progresser les relations entre la fille et sa mère. On assiste ainsi au schéma classique qui veut que chaque personnage puisse être défini par un ou deux points en particulier : l'un est acariâtre, l'autre est laconique, ou celui-ci a le sang chaud. L'originalité, vous l'aurez deviné, vient surtout du fait que ce système, d'habitude employé pour des groupes de jeunes filles, est ici utilisé pour distribuer les rôles à des hommes mûrs. Le seul problème qui peut alors se poser à vous sera de savoir, au bout des onze épisodes de la série, si vous êtes devenus gérontophiles (ai-je besoin de préciser que si c'était déjà le cas, Ristorante Paradiso est fait pour vous ?) Il est par contre évident que si ce type de procédé vous énerve, que ce soit par principe ou par fatigue de le voir utilisé abusivement, cette série est à éviter.

Néanmoins, je ne vais pas non plus aller vous faire croire que tout n'est qu'une copie de la formule basique d'une comédie romantique à la sauce animation japonaise, avec le groupe d'adoratrices stéréotypées qui tournent autour du personnage principal. Dans Ristorante Paradiso, les hommes possèdent en effet des personnalités de base classiques, mais leurs vies et leurs relations reflètent leur âge, ou du moins la vision fantasmée de ce que doivent être des gentilhommes : ils sont ainsi mariés ou divorcés, ont déjà connu les aléas de la vie et en ont tiré des leçons d'où coule leur sagesse commune. Ces leçons changent un peu de celles que l'on a l'habitude d'entendre dans ce type d'histoire, où les jeunes gens nous parlent avec passion d'avenir brillant : ici, vous serez servis par des hommes qui ont déjà soufferts, qui sont allés au casse-noix (restaurant oblige) et qui ont plus ou moins réussi à traverser des épreuves ; des hommes qui nous parlent avec calme et compassion.

Cette compassion va être la bouée de sauvetage pour Nicoletta, jeune femme sans réelle ambition lorsqu'elle débarque à Rome, hormis celle de se faire reconnaître par sa mère. Nicoletta étant le personnage central de Ristorante Paradiso, on découvre avec elle le passé du personnel du restaurant et les petites morales à en tirer ; d'autant plus qu'assez rapidement dans l'histoire, Nicoletta intègre le personnel du Casetta dell'Orso en devenant apprentie cuisinière. C'est une fois encore une formule classique, celle du personnage novice (et ici, jeune) qui va apprendre au contact des experts (âgés) son métier (et la vie) : l'expérience professionnelle se mélange à la sentimentale. Nicoletta va alors, au fur et à mesure, connaître les subtilités de la gastronomie et de l'oenologie au contact de ces maîtres du bon goût ; par contre, pour le spectateur tout cela reste dans le domaine de la magie culinaire, ne vous attendez pas à des cours de cuisine. Le tout est enrobé par la ville-carte postale de Rome, où tout n'est que douceur et amour, terrain de jeu idéal pour un scénario romantique. Et pour bien faire comprendre que l'on est en Italie, les personnages disent tous les termes de politesse et techniques en italien : à vous les grazie (merci), les cameriere (maître d'hôtel) et autres ristorante (fast-food).

La ville est joliment représentée par des dessins à l'aquarelle, dont la nonchalante apparence est communicative. Les architectures se nourissent de l'imaginaire collectif d'une Rome vieille et sereine, et la moindre sortie des murs romains laisse place à un terroir qui ne fait qu'accentuer l'impression d'un pays ancré dans ses racines. Teintes marron et beige à volonté ! Quant au design des personnages, hormis le nez prohibitif de la plupart des femmes lorsqu'elles sont de profil, je l'ai trouvé dans l'ensemble agréable, tout en longueur et finesse, accompagnant bien le ton calme de la série. Pas de folie dans l'animation ni dans le scénario, excepté, sur ce dernier point, un septième épisode qui dérive dans la mauvaise direction en tentant de marier une grande sobriété avec une grande naïveté, le tout donnant un résultat difficilement supportable et détruisant le peu de crédibilité que le spectateur peut donner à cet univers. Car si l'on n'adhère ni aux personnages, ni au fonctionnement de la série, il ne reste plus grand chose pour la défendre, à part son ambiance reposante.

Et c'est là-dessus que je concluerai cet article : sans arguments forts, Ristorante Paradiso ne tient qu'au bon vouloir du spectateur, selon les attentes de ce dernier. Cette série ne frappe pas fort, ne remue pas, ne retourne personne : mais ses vieux écorchés cicatrisants et sa douce mélodie seront de bons réceptacles pour les attentions posées.

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